Soutenu par Atlantis Télévision, Stéphane Le Diraison a mis pied à terre dans le centre de Melbourne après 54 jours de navigation. Dans cette Interview, le skipper nous livre son impression sur son parcours durant le Vendée Globe.

Interview de Stéphane Le Diraison

Tu viens de mettre pied à terre à Melbourne, raconte-nous ton arrivée en terre australienne ?

“C’était une arrivée complètement inattendue. Déjà l’entrée de la baie : c’est un peu comme Arcachon, il y a pas mal de courants qui nécessitent un certain nombre de précautions. Donc j’ai dû rester méfiant jusqu’à l’entrée de la rivière pour accéder au centre de la ville. Et en arrivant j’ai eu la chance d’avoir un accueil qui était complètement étonnant : il y avait je pense une bonne cinquantaine voire soixantaine de personnes qui m’attendait sur le ponton ! Ce qui est assez improbable en arrivant dans un port de commerce à Melbourne !

C’était incroyablement chaleureux, il y avait même une équipe de télévision parmi eux ! C’était fort sympathique, j’ai eu le droit à une super bel accueil et un bel hommage. Ils ont été tous tellement touchants… C’était bien car ça m’a permis de ne pas trop réfléchir quant à mon arrivée à terre…

C’était super positif, super gai, je les ai fait monter à bord. On s’est même retrouvés à un moment à 20 sur le bateau donc c’était un moment de décalage absolu par rapport à ma solitude depuis 55 jours bientôt ! D’un seul coup je me suis retrouvé entouré par plein de gens, des enfants aussi, c’était vraiment une belle transition très marquée.

C’est complètement improbable. Je me trouve dans le port de commerce au coeur de Melbourne avec les buildings derrière, c’est grandement original ! L’arrivée par la mer ressemble pas mal à celle de New-York.”

Comment s’est déroulée ton arrivée ?

“Les Australiens ne rigolent pas donc j’ai eu le droit tout de suite aux formalités sur place : les douanes sont venues chercher de la drogue à l’intérieur avec des chiens, la brigade sanitaire est venue inspecter l’intégralité de mes sacs de nourriture (et est repartie d’ailleurs avec un bon 10 kilos de nourriture qu’ils jugeaient impropres à l’Australie!), les cost guards sont venus ensuite contrôler mon passeport et la partie administrative.

Finalement tout est allé assez vite et j’ai pu aller rapidement me faire un bon restaurant, avec les quelques locaux sympathiques qui sont restés et qui m’ont gentiment attendus pour partager ce moment !
C’était une arrivée qui fait chaud au coeur !”

Quel est ton sentiment en touchant terre après autant de jours de mer ?

“Il y a évidemment une certaine satisfaction de retrouver un environnement clément. J’ai quand-même traversé des mers qui étaient loin d’être sympathiques et mon gréement de fortune commençait à bien faire… De ce point de vue là c’est évidemment un soulagement.

Melbourne n’est pas vraiment une option que j’avais envisagé en prenant le départ de ce Vendée Globe… Mais je suis satisfait en repensant à tout ce que m’a apporté ce projet, tout ce que j’ai appris et tout ce que j’ai fait. C’est une destination de choix car j’ai la chance d’être accueilli par toute une communauté de Français très solidaires. C’est également une très grande ville avec de très nombreuses infrastructures qui vont simplifier beaucoup de choses derrière.

C’est un retour positif malgré la situation. Il fait beau, il fait chaud, j’ai même pris un coup de soleil car je ne me suis pas méfié, j’étais vraiment habitué à des températures différentes !”

Tu viens de retrouver la civilisation après une longue période coupé du monde, quelle est ta sensation au moment de retrouver la civilisation ?

“J’ai souhaité volontairement ne pas me poser de questions ou ne pas me faire de réflexions du type « ça fait longtemps que je n’ai pas vu le monde ». J’ai pris cette arrivée d’une manière très positive, j’ai eu un accueil improbable et je leur ai raconté mes histoires, c’était chouette de pouvoir partager un moment à terre.

C’est assez étonnant la perception du temps. Sur l’eau parfois c’est très long et là je suis un peu déboussolé, comme si j’étais un peu perdu sur ce sujet. Je ne sais plus à l’instant si je suis parti longtemps ou pas, c’est assez bizarre comme sentiment.

Je n’ai pas souffert à proprement parler de la solitude en mer, donc le fait de me retrouver entouré me permet de rentrer dans une nouvelle phase. J’étais préparé à vivre une aventure en mer en solitaire, et là me voilà au milieu de personnes et c’est un sentiment ni désagréable ni déboussolant. De ce point de vue là je le vis vraiment très bien !”

Quel est ton programme à venir ?

“Le programme à très court terme ce soir est de ranger le bateau pour le laisser au ponton dans des bonnes conditions.

Je me suis fait prendre en charge par un Français, Christian, qui vit ici. Il m’a proposé ensuite de m’emmener passer le réveillon dans la campagne, dans le bush à une heure de Melbourne ! Quelques jours de repos mérités…

Je vais me reposer 2-3 jours pour vraiment couper complètement. Je rêve de bien dormir dans des draps secs, continuer à bien manger, bien me réhydrater.

Je vais revenir ensuite pour rentrer dans le dur : démonter le bateau puis envisager de manière extrêmement concrète son retour en France en cargo. Pour l’instant c’est encore prématuré. Je vais profiter un petit peu calmement de ces moments de l’arrivée.”

Comment as-tu vécu tes journées depuis ton démâtage ?

“Ce qui est extrêmement positif depuis que j’ai démâté c’est que je n’ai pas eu trop le temps de me poser et de ruminer car à chaque fois il y avait des choses à faire ou alors je me donnais un objectif vers lequel je tendais.

Il y a tout le temps de la dynamique et ça n’arrête pas de s’enchainer. Du coup je suis tout le temps dans l’action pour avancer et tout ça me permet d’imaginer le futur et de ne pas regarder trop négativement ce qui a pu se passer.

J’ai eu du temps pendant cette route au ralenti mais paradoxalement il y avait toujours des choses à faire pour optimiser la vitesse, gérer un croisement,… Je n’étais pas complètement détendu donc je suis à un niveau moyen sur l’échelle de la forme. Mais ce n’est pas très grave car je vais avoir bien le temps de me reposer.”

Un dernier mot ?

“Je tiens à remercier les personnes qui ont rendu ce moment inoubliable, merci aux Français et aux Australiens pour leur accueil, à Christian et au Ocean Racing Club of Victoria pour leur précieux support”

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Crédit photo: Ocean Racing Club of Victoria

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Crédit Photo: Alexis Courcoux

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 Crédit Photo: Alexis Courcoux