Cette année, Pekin Express fête sa 14è édition. Solveig Guy-Coquille : rédactrice en chef, Julia Tomasi : chef d’édition, Thomas Barneoud : directeur artistique et Victoria Sardaby : coordinatrice artistique, découvrez les coulisses de l’équipe éditoriale. Du tournage au montage, qui sont ceux qui font courir les binômes dans des paysages à couper le souffle.

Comment s’organise la préparation de tournage de Pekin ?

Thomas Barneoud : Je suis directeur artistique. J’ai en charge le repérage du programme. 5 mois en amont du tournage je pars 1 mois sur place et je prépare la route. Nous travaillons avec une société belge de production : Eccholine. Ils gèrent tout l’exécutif du programme et nous l’édito. Il y a un super travail d’équipe avec les belges. C’est un programme important en terme de logistique, nous sommes 120 personnes sur le tournage : chauffeurs, producteurs, fixeurs, LPA pour la traduction (local production assistant). Il y a une vingtaine de caméras sans compter le reste du matériel technique. Nous sommes 120 au début et plus la course avance, plus les équipes se réduisent forcément.


Tu travailles avec Victoria sur le tournage ?

Thomas : Oui elle coordonne le bon déroulement des épreuves. Elle met de l’huile dans les rouages. Elle est indispensable. Nous sommes un véritable binôme.

Victoria Sardaby : J’ai le plus beau bureau du monde. Un bureau nomade dans une excellente ambiance.

Solveig Guy-Coquille : Elle a sa camionnette ouverte avec son imprimante, son ordi, ses affaires. Elle a un bureau exceptionnel !

Cette saison a dû être particulière avec la crise sanitaire ?

Thomas : Nous sommes rentrés au bout de 15 jours de tournage… C’était vraiment bizarre je suis parti en repérage alors que la crise sanitaire n’était toujours pas présente, c’est allé très vite.

Solveig : Oui c’est 4 jours après notre arrivée en Ouganda que le pays a fermé ses frontières. Nous avons continué à tourner et nous sommes rentré le lendemain du discours d’Emmanuel Macron. 6 mois plus tôt, nous n’avions pas encore la mesure des conséquences de la crise. Nous avons vu la gestion de crise, j’ai vécu les premiers coup de fil : “on va fermer les frontières etc…” Observer le poste de producteur et la façon de gérer la crise est très intéressant. Ce sont des étapes et des tournages qui seront gravés à jamais avec cette crise sanitaire.

J’imagine que ça a engendré pas mal de changements ?

Thomas : oui… nous avons dû changer la route. Je suis parti en repérage en Ethiopie et aux Emirats et nous n’avons jamais tourné là-bas finalement. La route pour cette saison est donc la suivante : Ouganda, Grèce et Turquie. J’ai fait le repérage en juillet pour la nouvelle route et nous avons tourné en septembre. En 1 mois et demi nous avons fait le travail de ce que d’habitude nous faisons en 5 mois. C’est une véritable prouesse des équipes Belges car c’était un défi. Peu de productions sont capables de prévoir un tournage de cette envergure en un mois et demi.

Comment se passe la préparation ?

Thomas : Nous écrivons une bible à 4 mains avec Thierry Guillaume, producteur. Cette bible réunit le script de chaque étape, les jeux, leur principe (où, avec quel matériel etc…) Il faut compter 3 mois d’écriture pour cette bible. Il est important de préciser que son contenu est déposé. Il y a des étapes éliminatoires et elle est donc déposée chez un huissier. 80% de ce qui est dans la bible sera à l’écran. Les 20% qui restent sont dus à des aménagements d’intempérie ou des ajustements pour raisons de dernières minutes sur place.

Quel est ton parcours Thomas ?

Thomas : J’ai bossé pour Ninja Warrior, Top Chef, Danse avec Les Stars . Je n’ai pas de formation audiovisuelle. J’étais dans le milieu culinaire et au fur et à mesure de rencontres j’ai eu l’occasion de bosser en télé. J’ai rencontré Thierry Guillaume il y a 10 ans via une connaissance commune. Thierry est un producteur qui sait donner sa chance aux gens et leur offre la possibilité d’évoluer si ils en ont l’envie et la capacité. J’ai appris énormément de choses en télé grâce à Thierry.

Tu participe aussi au montage ? Il doit y avoir un côté grisant de voir le résultat du travail en amont ?

Thomas : Nous partons d’une page blanche du début à la fin. C’est une chance extraordinaire de voir tout ce qu’on a imaginé. Sur la post-production je passe chef d’édition comme le reste de l’équipe.

Solveig : En fait Thierry valide tout les épisodes et nous nous les répartissons en montage entre Julia, Thomas et moi. Victoria monte cette année les épreuves d’immunité et les jeux qui sont des moments à part dans la course et peuvent donc être monté de façon séparée. La deuxième partie de soirée est à la charge de Jean-Etienne Rives. Pour Thierry Guillaume, le producteur, c’est très important que les équipes de tournage puissent continuer sur le montage, cela permet une continuité.

Julia : La construction des épisodes en montage est vraiment intéressante. Personellement, la phase de mise en place des chemins de fer, le tétris du montage et l’évolution de l’histoire qui en résulte est génial. Il faut savoir organiser les séquences et travailler les moutures.

Tu as la gestion de la partie édito Solveig, c’est ça ?

Solveig : Je suis rédactrice en chef. En préparation, je gère les portraits des candidats. Je prépare les documents éditos pour les journalistes sur la base de la bible. Il y a une grande partie tournée comme du magazine, notamment sur les soirées où les candidats sont dans les familles et, par conséquent, la plupart des moments ne s’anticipent pas.

Thomas : En fin de journée sur le tournage, le téléphone de Solveig est un standard ! Il sonne toutes les minutes. Les journalistes, les malades, les galères du quotidien, les séquences à vérifier …

Solveig : Nous essayons d’anticiper au maximum. La préparation est une base. Les jeux d’immunités, eux, sont chartés. C’est aussi la force de ce programme : on ne peut pas anticiper l’auto-stop, ni les soirées. Une partie de la gestion en tournage est consacrée à répondre aux questions des uns et des autres. Il faut être réactif, ne rien oublier dans les séquences à tourner, les moments à ne pas laisser passer.

Comment ça se passe le suivi de la course ?

Solveig : Nous suivons les candidats grâce à leurs trackers sur un iPad et sur nos téléphones. C’est comme suivre un jeu vidéo! Parfois, nous sommes devant les écrans pendant 4/5 heures. Si tu vibres en regardant la course pendant le tournage, c’est qu’il se passe quelque chose. Parfois nous sommes comme des dingues. On se laisse nous-même prendre au jeu, certains se trompent de route, d’autres font des remontées folles. Il faut se prendre au jeu et rester partial.

Un fort lien se créé entre les journalistes et les candidats ?

Solveig : Oui mais il faut savoir garder sa distance. D’ailleurs, souvent, nous savons mieux garder notre sang-froid car nous n’intervenons pas directement. Les cadreurs et journalistes changent de candidats toutes les deux étapes. Cela leur permet de ne pas se retrouver à faire la course avec les candidats. Il faut de la bienveillance mais aussi garder sa distance. Nous devons rester garant des règles du jeu. Nous, nous sommes dans la voiture de production que nous appelons la field et les autres sont dans les courses. La moitié de mon travail est de l’édito pur. Il y a une équipe de journalistes d’un très gros niveau. Il faut savoir écouter. Tous les 3 jours nous nous retrouvons au même hôtel et il arrive que nous nous croisions au même endroit pendant la course. Je rappelle constamment les règle et je sers d’oreille, il faut savoir écouter à mon poste sur ce programme.

Thomas : Journaliste Pekin, ce n’est pas que du journalisme. C’est une condition physique, mentale et beaucoup de débrouillardise.

Dormir chez l’habitant avec la crise sanitaire devait être compliqué ?

Solveig : Les gens nous ouvraient quand même leur porte mais beaucoup ont dormi sur les terrasses, en extérieur. Cela a été plus difficile pour cette saison forcément.

Quelle est ton parcours ?

Solveig : J’ai fait de l’histoire. Je voulais être prof d’histoire à la fac. J’étais en DEA à la fac et je préparais mon plan de thèse sur les élites et la charité au XIXè. Finalement, seule aux archives, j’ai commencé à me dire que c’était trop solitaire pour moi, j’ai alors fait un DESS d’audiovisuel à Paris IV, ma seconde passion. Je voulais être reporter de guerre quand j’étais petite. J’ai un grand oncle qui était journaliste au Figaro et j’ai fait mon premier stage avec lui ce qui a confirmé mon engouement pour ce métier. Je suis de la génération où il y avait toutes ces grandes femmes reporters de guerre… C’était inspirant. J’ai commencé à la programmation de France 2. C’était une belle expérience mais pas assez dynamique pour moi, j’étais sur les grilles des programmes de nuit… Ensuite, j’ai bossé sur la Nouvelle Star, Master Chef. Je suis restée longtemps sur Les Reines du Shopping. Avec Pekin Express, j’allie ma passion du voyage et de l’édito. L’équipe est très sympa. Personne ne se prend au sérieux, c’est vraiment top.

Toi Julia, les voyages tu les fais régulièrement car une partie de ta vie est insulaire ?

Julia : Tout à fait. J’ai la chance de vivre sur mon Île de Beauté. J’ai commencé à travailler sur Pékin Express au moment de la saison 6. Aujourd’hui, pour des raisons familiales, je viens en tant que chef d’édition sur Pékin quelques mois par an.

Pourquoi as tu choisi d’avoir un pied sur chaque rive : Corse et continent ?

Julia : Il y a eu un moment de questionnement sur ma vie parisienne et mes envies. J’ai donc fait le choix de repartir en Corse et de reprendre le restaurant de mes parents dans le Cap. Une toute autre vie. J’y suis restée 2, 3 ans. Mon expérience des tournages et du travail d’équipe a été un réel atout pendant cette période car quoi de plus important que la coordination humaine en restauration ! Cependant, ma passion pour la télé m’a vite rattrapée mais je ne voulais pas non plus laisser ma qualité de vie Corse. J’ai donc la chance aujourd’hui d’avoir le meilleur de Paris et le meilleur de Bastia.

C’est un rêve pour beaucoup ! Comment t’organises-tu ?

Ce qui est important c’est de préserver ma vie de famille au maximum, donc, quand je suis en mission à Paris pour 3 à 4 mois par exemple, ma fille me rejoins pour toutes les vacances scolaires et je fais des allers-retours les weekends le plus régulièrement possible. En général, un weekend sur deux. J’ai également des missions pour une agence de communication 360 en Corse. Je m’occupe de la partie vidéo, nous faisons beaucoup d’institutionnel et de pub. Ainsi, je garde un pied dans l’univers de l’image une fois là-bas.

Quel est ton parcours ?

Après un Deug d’histoire à la Sorbonne, je suis entrée dans une école de journalisme et pendant ma 3ème année j’ai fait un stage chez Réservoir Production. J’étais sur l’émission La Quotidienne pour Téva à l’époque, puis sur Ça se discute. Je suis devenue un “bébé Réservoir Prod”comme on dit. J’y suis restée 6 ans. J’ai rapidement intégré les équipes et suis devenue journaliste. Ensuite, j’ai enchaîné chez Glem sur des émissions de télé-réalité puis j’ai une expérience d’assistante réalisatrice pour un documentaire pour Arte mais je me rends compte, après cette expérience enrichissante intellectuellement que j’ai besoin du travail d’équipe. Je me suis retrouvée par hasard sur le programme Top Model et c’est là que j’ai rencontré Thierry Guillaume et eu l’opportunité de travailler sur Pékin Express.

Comment s’organisent tes journées ?

Je commence par 2 cafés, je discute un peu et j’attaque rapidement. Je regarde avec ma monteuse où en est mon épisode et nous revoyons le travail de la veille. Il en découle la suite logique de ce qu’il reste à faire. Il faut se fixer des axes d’édito et construire l’épisode.

Tu as toujours voulu faire ce métier ?

Quand j’étais à l’école, un journaliste du monde est venu parler de son métier pendant un cours d’histoire. Ce fut une révélation. J’ai été très impressionnée par son métier. Pour moi, c’est un métier qui s’apprend sur le tas, il ne fait pas avoir peur de se lancer ! Aujourd’hui je me rends compte qu’il faut une bonne dose de curiosité évidemment pour faire du journalisme. Il faut vraiment savoir écouter et ne pas avoir d’à priori. Surtout, savoir toujours bien se documenter et lire la presse.

Et toi Victoria, quel est ton parcours ?

Je voulais être journaliste. J’ai fait Histoire à Paris IV comme Solveig et je préparais Kagnes et Hypokagne. Je suis ensuite partie à San Fransisco pendant un an. J’avais besoin de voyager. Après un stage dans un boite de production institutionnelle là-bas, j’ai repris un master en Angleterre dans les médias. J’ai fait un stage chez Fremantle et, plus tard, une copine qui bossait sur Pekin m’a dit qu’ils cherchaient un renfort. J’ai fait passer mon CV à Thierry et Thomas et ils m’ont proposé le poste d’assistante de Thomas. Je prépare les instructions, les tests jeux, les épreuves.

Thomas : Nous sommes un vrai binôme. Elle gère aussi l’arbitrage sur les épreuves et le briefe des candidats. Elle a réussi à se rendre indispensable sur les tournages. Victoria est discrète et d’une efficacité incroyable.

Et tu rejoins aussi l’équipe de post-production Victoria ?

C’est ma deuxième année en post prod, je suis coordinatrice. J’ai deux rôles. Une fois le montage d’un épisode terminé il faut l’habiller. La graphiste, Carole, s’occupe de tout l’habillage: elle crée toutes les cartes, graphisme des jeux, animations. Je fais le lien entre les chefs d’édition et Carole. Cette année, je monte les jeux d’immunité, c’est un très bon exercice.

Qu’est ce qui vous plait le plus dans votre travail ?

Victoria : C’est l’ambiance forcément. L’équipe est top. Le tournage me plait car j’adore le binôme que nous formons avec Thomas. La machine est très importante et cela fonctionne bien. Un problème ne reste jamais sans solution très longtemps. L’aventure Pékin est une chance pour moi, j’ai découvert la post-prod, le tournage, les mises en place. C’est la possibilité de découvrir l’aboutissement et la fabrication d’un programme de A à Z.

Thomas: Ce qui me plaît pour ma part, c’est la façon que nous avons tous d’être super réactifs. Un problème devient une situation à jouer. Ensuite, j’ai la chance de pourvoir vivre un Pekin en solo sur le repérage et c’est exceptionnel à vivre.

Julia : De mon côté, c’est vraiment l’émergence de l’histoire à partir des images et sa construction que je trouve fantastique.

Solveig : J’aime le changement. Changer de rôles, changer de poste, changer d’endroit. C’est un luxe dans nos métiers. Pekin, c’est une des meilleures émissions sur lesquelles bosser en télé. La première fois que j’ai vu le tournage, j’ai vu une machine huilée à la perfection. Tout le monde sait ce qu’il a à faire dans une parfaite osmose.